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Claire Ballongue

Pour que les symptômes ne restent pas sous silence. À propos de l’ouvrage "Le silence des symptômes, enquête sur la santé mentale et le soin des enfants"





La récente parution du dernier ouvrage de Sébastien Ponnou : Le Silence des symptômes. Enquête sur la santé mentale et le soin des enfants (étude qu'il a co-dirigée avec Xavier Briffault et Frédérique Chave) vient traduire une nécessité de porter un certain dire à l'attention du grand public.

Sébastien Ponnou poursuit le travail qu'il avait initié avec sa précédente publication (2022), À l'écoute des enfants hyperactifs. Le pari de la psychanalyse.

Le Silence des symptômes prend appui sur les données scientifiques très précises, collectées et analysées, en vue de la rédaction du rapport du Haut Conseil de la Famille, de l'Enfance et de l'Age du 7 mars 2023.

L’auteur fait ici le choix, qu'il qualifie d'urgent, « d'aligner l'éthique, les données de la science et la communication à destination des patients et du grand public » (p. 46). Étayé sur des sources scientifiques solides et orienté par l'éthique de la psychanalyse, il rend clairement compte de ses analyses, soutenant sa position de façon décidée, quand bien même elle vient en contrepoint d'une orientation sociétale qui cherche à réduire les symptômes au silence tel qu'épinglé dans le titre même de l’ouvrage.

Prenant appui sur une démarche scientifique rigoureuse Sébastien Ponnou développe son argumentation à partir des questions soulevées par le trouble déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) et la dépression. Il repère que « 30 années de politique de santé mentale orientée par les approches biomédicales n'ont pas empêché un accroissement de la souffrance psychique des enfants et des adolescents, une augmentation du taux de suicide, un déficit chronique de l'offre de soin, une mise à mal des institutions et des équipes de soin et d'éducation, un effet ciseau entre la demande et l'offre de soin, des délais d'attente insupportables, une augmentation continue de la consommation de médicaments psychotropes chez l'enfant » (p. 55). Il révèle au grand jour l'usage très problématique des médicaments bien trop souvent prescrits sans respecter l'autorisation de mise sur le marché ou les recommandations des agences de santé. Ces éléments sont précisément dépliés dans cet ouvrage. Retenons ici la question de la substitution de prescriptions médicamenteuses à des pratiques psychothérapeutiques, éducatives et sociales.

Sébastien Ponnou démontre comment la convergence entre réductionnisme biologique, science nomothétique et new management des organisations publiques nous ont conduits à l'impasse et au malaise actuel quant au soin psychique des enfants et adolescents.

Prenant appui sur les recommandations de l'OMS (2022), lesquelles précisent notamment qu'il « faut absolument que les systèmes et les services de santé mentale élargissent leur horizon au-delà du modèle biomédical, au profit d'une démarche plus globale prenant en considération tous les aspects de la vie du patient » (p. 48), S. Ponnou propose de s'orienter de la politique psychanalytique du symptôme, d’une clinique du cas par cas. Il prône une articulation entre les champs scolaire et médico-social, qui prenne appui sur « la clinique des petits riens », un travail d’équipe au quotidien, interdisciplinaire, qui relève de l'artisanat sinon du bricolage.

Trois grands axes sont proposés pour une politique publique ambitieuse qui permettrait « d'investir massivement dans les dispositifs et les pratiques psychothérapeutiques, éducatives et sociales de première intention » :

- « Abonder les moyens humains et matériels de l'école, de l'hôpital, des institutions médico-sociales et du secteur associatif de manière à produire un travail de qualité, qui donne à chacun accès au soin et au savoir,

- reconnaître et valoriser les pratiques et les savoir-faire de terrain, soutenir les dispositifs de formation plutôt que de multiplier et d'imposer des guides standardisés de bonnes pratiques,

- considérer le soin et l'éducation comme des métiers de l'humain, de la relation et de la parole sans commune mesure ; des pratiques du singulier, de l'écoute, du lien et de la médiation qui s'inventent dans l'épiphanie de la rencontre » (p. 130).

 

Espérons que les politiques sauront se saisir de ces propositions.


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