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Un algorithme prédictif



Le chapitre « De nécessaires évolutions » du rapport de l’académie nationale de médecine s’empare du futur et s’attache à la question du développement des nouvelles technologies appliquées aux pratiques de psychothérapie.

La 5ème recommandation du rapport est formulée de la façon suivante: «une labellisation des outils numériques utilisables pour certaines modalités psychothérapiques à l’instar de ce qui est en vigueur pour les dispositifs médicaux ».

Il s’agit donc d’appliquer à la santé mentale ce qui se pratique dans le champ médical. Ainsi, la télésurveillance permettant à un médecin d’interpréter à distance des données recueillies sur le lieu de vie du patient telle qu’utilisée dans le suivi des insuffisances respiratoires ou cardiaques par exemple, pourrait, à terme, être utilisée pour un certain nombre de patients souffrants de troubles psychiatriques.

Le rapport met en avant la question du développement des nouvelles technologies en partant de l’usage qui peut être fait, dans les pratiques de psychothérapies du Smartphone, de la visioconférence, de la réalité virtuelle. Trois occurrences très différentes de l’utilisation possible du numérique et que l’on peut difficilement mettre sur le même plan.

Concernant l’usage du Smartphone, il ne s’agit pas de l’usage du téléphone ou des SMS mais d’applications que le patient peut directement télécharger pour sa propre prise en charge comme, par exemple, la solution SimpLe, un outil digital de psychoéducation ou la solution Happyneuron, outil digital de remédiation cognitive.

Parmi les expérimentations recensées dans ce rapport, nous trouvons le passeport BP :« Parcours de soins pour patients bipolaires. »

Ce projet est porté par la fondation FondaMental laquelle s’intéresse à la neurologie, la biologie, la génétique, l’imagerie cérébrale, les prises en charges médicamenteuses pour prévenir et soigner les troubles psychiatriques.

L’arrêté du 26 Août 2019 précise l’objet de cette expérimentation : « mettre en œuvre une prise en charge intégrée (psychiatrique et somatique) spécialisée et personnalisée des patients atteints de troubles bipolaires avec un suivi rapproché et coordonné par des case-managers à l’aide d’outils numériques ».

Les « case-managers » sont des infirmiers chargés d’assurer le suivi et la coordination du plan de soin personnalisé. Un algorithme prédictif de risque d’hospitalisation et d’arrêt de traitement aidera à détecter les indices de détérioration de la santé du patient et d’ajuster le plan de soin en fonction. Des outils numériques (plateforme de télésurveillance, applications de psychoéducation et de remédiation cognitive) sont développés. On se demande quand est envisagée une rencontre réelle avec le patient…

Non mentionnés dans le rapport, un certain nombre d’équipes de recherches œuvrent au développement de ces outils numériques du futur. L’équipe du Professeur Dollfus du CHU de Caen travaille sur le prototype d’une application destinée à évaluer en temps réel les hallucinations auditives des patients schizophrènes, le recueil à distance de l’état émotionnel du patient, la conception d’un agent virtuel capable de détecter les troubles du quotidien et d’amener le patient à se confier.

L’unité de recherche SANPSY de l’université de Bordeaux et du CNRS USR 3413, quant à elle, a conçu, en 2015, un « agent conversationnel ». « L’agent conversationnel » est une sorte de psychologue virtuel qui réalise des entretiens de prévention et de diagnostic sur le thème des addictions. Ils firent de même en 2017 pour la dépression. Et de conclure que c’est un moyen efficace parce qu’évitant « le risque de jugement » et économique pour mettre en évidence une dépendance ou un état dépressif.

Certes, seule l’expérimentation passeport BP est mentionnée dans ce rapport mais la volonté de labelliser les outils numériques associé aux programmes de recherches en cours ne peuvent que nous faire craindre le pire. L’unité SANPSY de Bordeaux, rien que par le choix de son nom indique bien une volonté de se passer de la parole.

Souhaitons-nous vraiment, professionnels, patients, familles de patients un tel avenir ?

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