
La 8ème Journée de l’Institut Psychanalytique de l’Enfant qui se tiendra le 22 mars 2025 à Issy-Les-Moulineaux, dont le titre est Rêves et fantasmes chez l’enfant, est une chance tout autant qu’une nécessité, pour maintenir vivace la joie que je trouve à mon travail en institution en tant que psychologue freudienne. Pour moi, travailler dans une institution qui accueille des enfants et des adolescents de l'illimité[1] relève d’un engagement éthique tout autant que de l'acte de ne pas reculer devant la psychose. La lecture des conséquences des discours contemporains sur l'enfant, sa famille, mais également sur les professionnels qui y travaillent fait partie du sel de la clinique institutionnelle. La généralisation massive du « diagnostic » de TDAH chez les enfants orientés dans l’ITEP dans lequel j’exerce produit un « tous pareils » qui commence à avoir un effet de non-sens pour les professionnels du champ éducatif. Ces derniers butent sur le hors-sens des symptômes d’agitation et de désinsertion au champ de l’Autre des enfants dont ils s’occupent. J’ai fait un pari, celui d’un travail de proximité auprès des éducateurs qui vise à soutenir l’ouverture sur le champ de la parole de l’enfant. Je constate que ce travail de mise en valeur de la parole de l’enfant et du goût pour les détails, produit un déplacement du dire des éducateurs. Ils se rendent compte que le TDAH ne cerne en rien ce qui relève de la singularité de l'enfant et qu’il ne donne aucune clé sur la manière d’y faire avec ce qui ne s’entame pas par la seule éducation. Alors ce diagnostic pris comme un signifiant parmi d’autres perd de sa consistance dans la chaîne des signifiants qui traversent l’institution. Par contre la précision et la rigueur de la clinique que nous construisons ensemble est orientée par l’appui sur les concepts freudiens qui font orientation.
La 8ème Journée de l’Institut de l’Enfant du Champ freudien est un précieux soutien épistémique pour ne pas reculer devant le pousse à l’évaporation de la clinique à l'œuvre dans les « bonnes pratiques » recommandées par l’ARS. La préparation à cette journée d’étude me permet de trouver des points d’éclairage inédits de la clinique par l’appui sur un savoir en constante élaboration. L’articulation de la clinique à la théorie est un work in progress permanent.
S’intéresser aux rêves et aux fantasmes de l’enfant, c’est s'intéresser au réel pulsionnel qu’il traite ainsi qu'à des moments de constitution subjective qu’ils indiquent. Lorsque je me fais adresse de son récit fictionnel, l’enfant me dévoile la façon toute singulière qu’il a de se loger dans « stabitat qu’est le langage[2] ».
L’éclairage psychanalytique participe alors à faire exister la singularité de l’enfant et fait résonner son inconscient. Je constate, non sans une certaine satisfaction, que ce discours se diffuse discrètement, mais assurément, dans l’institution.
La fiction n’est pas mensonge, mais « déplacement et condensation d’une valeur de jouissance sur une représentation imaginaire[3] », ce qui change la façon d’entendre et d’accueillir les fantasmes et rêves de l’enfant pour l'élever à la dignité d’un travail très sérieux de construction de sa réalité subjective. Faire une place d’exception à ce qu’articule l’enfant de ses fantaisies ouvre le champ de son énonciation singulière nouée à l’inconscient.
Ainsi chaque journée de l’Institut de l’Enfant est une boussole pour orienter la façon d'accueillir les énonciations singulières de chaque enfant ou adolescent qui tente de cerner un impossible à représenter, en ouvrant la voie de son désir par une construction signifiante adressée.
[1] Cf Marty M.-C., Les adolescents de l’illimité, Chronique sociale, 2015.
[2] Lacan J., « L’étourdit », Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 474.
[3] Roy D., « Rêves et fantasmes chez l’enfant », Institut psychanalytique de l’enfant, disponible sur internet.
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