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Écho de la soirée Autisme : contre le dogmatisme - L’humilité contre l’universel



Josselin Schaeffer
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Cette soirée organisée par l’association des psychologues freudiens s’inscrivait dans le cadre de la diffusion de la brochure intitulée « Position psychanalytique contre le dogmatisme appliqué à l’autisme ». Elle réunissait, dans une ambiance studieuse et conviviale, ses trois signataires, Patrick Landman, François Leguil et Jean-Claude Maleval, autour d’un webinaire passionnant. Lors de cette soirée, chacun d’entre eux a pu répondre à des questions, posées par quinze cartellisants, questions traversant le champ de l’autisme, mais faisant écho plus largement au combat que mène l’association pour la promotion d’une pratique clinique de la psychologie orientée par la psychanalyse.

Déconstruire les fondements du dogmatisme appliqué à l’autisme par un travail précis et très bien documenté, c’était aussi, pour ces trois rédacteurs, déconstruire les idées fallacieuses savamment entretenues sur la psychanalyse et son approche soi-disant rétrograde de l’autisme.

La psychanalyse depuis Freud est indissociable d’une lecture du malaise dans la civilisation. Loin de s’offusquer des mutations contemporaines, de s’y dissoudre ou de s’ériger en unique recours, elle « consiste à inventer un mode de prise en charge propre à la singularité de chaque autiste ».

Initié aux États-Unis, le mouvement de dépathologisation de l’autisme le faisant basculer du statut de maladie mentale à celui de handicap allait, non seulement se répandre en Europe et en France, mais aussi nous donner le modèle d’un changement plus global dont les cliniciens peuvent éprouver les effets quotidiens dans leur pratique. Il a été rappelé que les diagnostics, exponentiels en ce qui concerne l’autisme, ne sont pas fiables malgré l’apparente scientificité des outils de dépistage. L’approche catégorielle de la psychiatrie classique laisse désormais sa place à un abord dimensionnel par le spectre. Cette approche, parfois déroutante est néanmoins pour une part progressiste et inclusive, comme en témoigne l’usage spontanée de l’auto-nomination narcissique qui en est faite.

Le monde moderne tolère mal le mystère. Pourtant, l’étiologie de l’autisme n’est absolument pas tranchée, elle est en tout état de cause multifactorielle, n’en déplaise aux discours dominants. Le tout biologique et la neuro-imagerie en particulier, en matière de psychisme, ne pourra pas tenir ses promesses d’efficacité notamment parce qu’elles ont pour fondement de forclore le sujet.

Les assertions serinées itérativement par les maîtres modernes, se réclamant de la science, de l’Evidence Based Medicine (EBM) et de méthodes pseudo-objectives d’évaluation, négligent à dessein ce qui leur échappe comme « la capacité d’insertion sociale » des autistes au profit d’un chiffrage « des améliorations de la cognition et de certains comportements ». Loin de prouver l’efficacité des méthodes parfois autoritaires qu’ils promeuvent, c’est par l’intimidation d’un marketing et d’un lobbying agressif que ces oligarques scientistes tentent d’imposer leurs vues. Quand on discrédite l’héritage historique de la psychiatrie et la référence à la psychanalyse, c’est la parole que l’on bâillonne et avec elle un certain rapport à la vérité.

À l’image de la brochure, « Position psychanalytique contre le dogmatisme appliqué à l’autisme », ce fut une soirée enseignante par son ton à la fois « aigu et tempéré », ne reculant pas à faire saillir les paradoxes sans les abraser. Cette position de non savoir pourra sans doute éclairer les cliniciens qui accepteront de faire de l’absence de certitude la boussole éthique de leur pratique. L’humilité contre l’universel comme seule « recommandation » pour écouter les autistes. L’envers d’un dogmatisme en somme.

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